Shampoo de Pgaz(*)

Le niveau d'exigence lié à l'importation d'un véhicule en Australie, est sans doute un des plus élevé de la planète. Un peu comme si votre véhicule devait entrer dans une salle d'opération chirurgicale ! Trois étapes à franchir : les services de douane, la quarantaine sanitaire et le contrôle technique du véhicule. Trois occasions, bien incontournables, de rencontrer du personnel allant du professionnel n'ayant pas perdu son bon sens à celui qui veut prouver sa toute puissance.

Nous connaissions les exigences : le véhicule doit être propre comme neuf. Ni aliments, ni graine, ni eau, ni traces de boue, d'insectes, de poussière ou de matières végétales (bois, paille, plumes, fibres, etc). Nous avions recueilli des informations auprès de voyageurs ayant préparé à fond leur véhicule et qui, pour la plupart d'entre eux, ont dû faire refaire tel ou tel nettoyage puis revenir passer de nouvelles inspections. Du temps, de l'argent et combien d'énergie, durant deux à trois semaines, parfois plus, avant de récupérer leur véhicule.

Nous étions motivés et déterminés à faire entrer Pgaz en Australie au mieux possible. Nous pensions que cela signifiait une forte implication personnelle pour faire par nous même le maximum et superviser, au plus près les nettoyages mécaniques hors de notre portée faute de connaissances ou d'outils adaptés : le moteur, les roues, les freins, le châssis, les sièges et la cabine avant, etc. Nous espérions trouver au Timor Leste, une entreprise d'expérience avec un équipement (jets haute pression, lift, produits de nettoyage, etc) ainsi qu'un savoir faire éprouvé (mécaniciens professionnels, contrôle du travail, etc). Part de rêve ! Les réalités ont été bien différentes. Pas de hangar ni de lift, peu d'outils, notre kit a été bien utilisé comme nos quelques produits de nettoyage. Travail en plein soleil à 40 degrés, sans compter sur le peu de bon sens naturel ou de méthode de base ! De la bonne volonté, certes, mais il a fallu une constante vigilance pour contrôler et faire refaire jusqu'à un résultat correct. Jacques supervisait à l'extérieur. Je travaillais sans relâche à l'intérieur avec chiffons, lingettes, cure-dents et piques à brochettes, brosses, détachants, etc. Chaque geste était dédié au résultat : "nous y arriverons du premier coup". Nous dégoulinions de sueur, Jacques avait le dos cassé et se mouvait avec difficulté tellement il souffrait. Le soir nous revenions éreintés à pied jusqu'à l'hôtel de bord de mer. Ces 2,5 km effectués matin et soir étaient notre seule balade ! Juste une transition entre le droit de s'allonger et l'obligation de se donner à fond tant physiquement que mentalement. Tension également du fait des échéances et des démarches administratives : arriver à savoir la date de départ du bateau, attendre le container d'une heure à l'autre, passer à la douane, etc.

Tout a commencé, pour nous, cinq mois auparavant. Impensable de se présenter avec des moustiquaires dont les bandes velco avaient fondu au soleil. Au Cambodge, à Phnom Penh, dans le garage de Finn, le norvégien aux multiples talents et au grand coeur, nous a mis à disposition une équipe de huit personnes. Deux par moustiquaires, une dehors et une dedans pour pousser les aiguilles au travers de la tenture matelassée et coudre de nouvelles fixations. Deux journées pleines et combien amicales ! La veille, nous avions enlevé, non sans peine, les traces de colle laissées par le velcro fondu.


Quelques éléments tirés de l'expérience vécue en juillet 2011 à Dilli dans l'entreprise de TROY Adams (Voir Liens).
On peut "prendre de l'avance" en éliminant les éléments "douteux" : nous avons remplacé les rangements en carton par des boîtes en plastique, fait la chasse aux souvenirs en bois, plume, pierre, rafia ou fibres, donné la nourriture de réserve. On peut aussi nettoyer en avance tous les joints de la porte du frigo, les brûleurs de la cuisinière, la cassette des toilette, les fauteuils pliants, les outils, etc. Autre anticipation : Jacques change toutes les serrures des placards qui avaient un peu rouillé durant la mousson indienne. Grand lavage des housses de coussins et de matelas. Nous essayons de préparer ce qui peut être fait à l'avance.

La suite est dans "la" liste, liste des nettoyages et ordonnancement de ceux-ci. En effet nettoyer au jet et sécher les casiers de rangement nécessite de pouvoir les vider, donc d'avoir de la place pour entreposer et trier les choses avant de les remettre en place.
Travailler par catégorie et moyens nécessaires : plus facile de nettoyer seul toutes les semelles des chaussures que les fenêtres qu'il faudra démonter (à deux) pour faire la chasse aux feuilles ou insectes glissés sous les joints, pour passer au jet les moustiquaires avant de remonter le tout.
Garder trace des étapes du nettoyage avec des photos prises au cours des travaux. Cela permet de constituer un press book à la disposition des inspecteurs australiens.
Pour la petite histoire, au dernier moment, Pgaz est dans le container, bien sanglé et la fumigation doit commencer. Je regarde notre véhicule une dernière fois et constate que le phare gauche n'a pas été nettoyé. Pour une première impression, le douanier verra un phare bien clair et l'autre opaque ! Je tente une ultime démarche avec mes piques à brochettes et mes lingettes, Jacques coupe court. La fumigation est allumée et le container est scellé. Trop tard.

Huile de coude et moral d'acier ! Self contrôle pour ne pas s'énerver et idée fixe sur le résultat visé pour ne pas relâcher l'effort, le sien et celui de l'équipe locale. Le mécano arrête son travail à cinq heures, le résultat visé ne fait pas partie de ses préoccupations.
Au final, il y a aussi le facteur chance : chance de tomber, pour les trois étapes à franchir, sur des inspecteurs "normaux".